Cinéma Trianon
Le cinéma municipal Le Trianon, toujours en activité, a vu le jour sous sa forme moderne en 2003. Ses racines sont néanmoins beaucoup plus anciennes.
Les débuts du cinéma à Sceaux et dans les Hauts-de-Seine
L’histoire du cinéma à Sceaux commence en 1907, en plein centre-ville, lorsqu’un des frères de la famille Pathé, Théophile Pathé, décide d’installer dans le bâtiment de la Justice de Paix - plus connu désormais sous le nom d’ancienne mairie – un cinématographe. Cette première entreprise ne dure que quelques années, la société Théophile Pathé étant mise en liquidation judiciaire en 1913.
Ailleurs dans les Hauts-de-Seine, les premiers cinémas à part entière créés sont L’Alcazar en 1915 à Asnières-sur-Seine, en lieu et place du café-concert du même nom, et le Mignon Palace à Boulogne-Billancourt conçu par l’architecte Marcel Fabre en 1913. Ce dernier est transformé dans les années 1930 et prend le nom d’Artistic Palace, puis disparaît dans les années 1980.
La création du cinéma privé Trianon
Après cette première expérience cinématographique et la fin de la Grande Guerre, un cinéma voit le jour à Sceaux, rue Marguerite Renaudin, le 21 juin 1921. Si l’emplacement change, le cinéma nouvellement constitué est lui aussi en centre-ville et possède une identité propre. Il est créé par Edouard Lechevallier dans un espace destiné originellement à la réparation de voitures. Les séances de projection ont lieu uniquement les fins de semaine et présentent des films muets en noir et blanc.
Le cinéma sera exploité entre 1921 et 1991 par quatre familles successives. Après Lechevallier viendront les familles Olivier, Chamberlain puis Enten. L’unique salle, de 234 m², peut accueillir jusqu’à 249 spectateurs, mais peu à peu, la fréquentation se tarit et le dernier exploitant, Enten, vend Le Trianon en 1988 à un promoteur immobilier, auteur de nombreux projets à Sceaux : Franco-Suisse.
Menace de fermeture et reprise municipale
Dans un premier temps, le cinéma parvient à soutenir une petite activité, mais en décembre 1992, il s’arrête complètement faute d’entrées suffisantes : de 60 000 entrées dans les années 1980, il passe à 25 000 en 1992. Le promoteur souhaite alors transformer le bâtiment et changer sa destination pour en faire un immeuble d’habitations. Ce projet entraîne la création de l’Association Les Amis du Trianon, qui se mobilise pour la sauvegarde du cinéma et fait circuler une pétition à travers la ville. Face au succès de la pétition, qui recueille 5000 signatures, le maire de l’époque, Pierre Ringenbach, et son adjoint, Philippe Laurent, décident lors du conseil municipal de décembre 1992 la reprise du cinéma à titre expérimental. Le promoteur loue alors le cinéma à la municipalité et le Trianon rouvre ses portes en 1993 après quelques travaux de première nécessité. En 1994, la mairie décide de prolonger l’expérience du fait de l’augmentation de la fréquentation du cinéma, puis rachète les murs au promoteur trois ans plus tard. L’exploitation de la salle est déléguée à la scène nationale des Gémeaux dans le respect d’une programmation de type Art et Essai.
Cependant, très rapidement après son rachat, de nouveaux travaux sont à envisager, le cinéma ne répondant pas aux normes récentes : distance du projecteur à l’écran inadaptée, défaut d’isolement acoustique, problèmes de structures. Sa démolition est projetée ainsi que celle des logements au-dessus et à côté, ce qui comprend en tout 645 m² de surface.
Reconstruction du cinéma
En juin 2000, le conseil municipal vote le principe de reconstruction du Trianon. Un concours d’architecture est lancé pour sélectionner le maître d’œuvre qui va reconstruire Le Trianon sur le même site. Le 27 février 2001, l’architecte Frédéric Namur le remporte. Cet architecte, diplômé depuis 1977 d’UP1 Paris-Villemin fusionnée plus tard au sein de l’école d’architecture Paris-Val de Seine, s’est spécialisé dans la construction de cinémas à partir de 1986, aussi bien en France qu’à l’étranger. Il a entre autres, aidé en 1996 à la rénovation des salles de cinémas Le Partizan et Le Telsa à Sarajevo, ainsi qu’à l’aménagement du mk2 quai de Seine à Paris. Après la construction du Trianon, il s’occupa de la conception de très nombreux autres cinémas, comme Le Sélect à Antony, le Ciné Cambaie premier multiplexe sur l’île de la Réunion, l’Ariana à Kaboul, et une salle pour le Dalaï-Lama à Dharamsala.
Pour le cinéma de Sceaux, Frédéric Namur s’applique à allier mise aux normes et modernité : écran de dix mètres de base, son dolby EP650 D numérique et boucle magnétique pour les malentendants, sept places handicapées, le reste étant des assises fixes. Il privilégie la qualité architecturale, répondant ainsi aux exigences du maître d’ouvrage, au niveau des matériaux utilisés (pavés de granit, du bois, du zinc, de la brique), de la végétalisation des zones d’accueil (terrasses-jardins, plates-bandes de gazon aujourd'hui disparues, murs de passage tapissés de vigne vierge ou glycine) et de la grandeur des locaux (salle de 263 places, espace-salon, bureaux et salle de réunion accessibles au public au premier étage de 116 m2, bureaux non accessibles au public au deuxième étage). Enfin, il assure une continuité historique en respectant des contraintes urbanistiques : salle mono-écran, hauteur maîtrisée grâce aux demi-niveaux et à la création d’un bâtiment légèrement enterré, cinéma à découvrir en cœur d’îlot du fait d’une partie non-constructible en-deça de 15 mètres depuis la rue Renaudin, choix de tonalités rouge et jaune pour rappeler le centre-ville. Sont aussi conservés certains éléments du précédent Trianon comme les luminaires dans la salle.
Dans son projet, Frédéric Namur donne une identité autonome au cinéma, grâce à une façade d’emblée assimilable à un lieu de spectacle. La salle en gradins se lit ainsi dès l’entrée à travers la diagonale semi-vitrée du mur de façade, qui laisse deviner la présence des fauteuils alignés en pente dans la partie opaque. Le hall d’accueil comprenant la billetterie est accessible depuis une passerelle et se trouve donc sous la déclivité de la salle. Concernant l’organisation du bâtiment, l’architecte renouvelle de deux manières le fonctionnement du Trianon. Il distingue l’accès au cinéma par la passerelle de l’accès aux locaux municipaux situés dans les étages par un escalier et une coursive. D’autre part, il permet un très important gain de place en choisissant les demi-niveaux, puisque le nouveau Trianon gagne plus de 335 m² par rapport à l’ancien, atteignant une surface totale de 980 m². Pourtant, cette densification s’est faite conjointement à une volonté de ne pas remplir excessivement le fond de parcelle, mais bien de l’évider le plus possible, par des jeux de reculs, alignements, de superpositions et de contrastes de matières.
La démolition est exécutée en 2002, et dans la foulée, le chantier de reconstruction est ouvert en mai de la même année. Après onze mois de travaux, le 29 mars 2003, le nouveau Trianon tel qu’on le connait aujourd’hui est inauguré. En septembre 2003, la fréquentation du lieu a augmenté de 20% sur six mois et est annoncée à 60 000 entrées pour l’année. Aujourd’hui, le cinéma enregistre une fréquentation moyenne de 65 000 entrées par an, et en 2019, 72 717 billets ont été vendus.